TESTAMENT A LA GLAISE
C’est de l’au delà que le narrateur du roman de Simonetta Greggio s’adresse à Blue, l’amie de toujours, seule désormais, brisée par le chagrin.
Revenue au Col de
l’Ange, dans le chalet où l’enfance les heurta et les construisit à la fois,
Blue, au gré de promenades avec sa chienne Youza se souvient, se recueille, puis retrouve
Marcus, le frère du disparu. Héritière du passé, mémoire vivante de celui qui
fut un riche architecte et mourut comme un animal, Blue erre dans une nature
glacée, presque hostile, parsemée d’insectes, de papillons, d’animaux, d’elfes
et de rêves éteints. La neige colle aux chaussures, la boue aux souvenirs
malsains. Blue, sans le savoir, se défait du passé en renouant avec lui. Marcus
et Blue vont, on le pressent, passer le col, retrouver la verte vallée. Ce bref
récit, ce long testament, possède les défauts du roman intimiste. Pas assez de
souffle, pas d’ambition pour les personnages. A croire que la vie, l’amour, la
mort, peuvent se raconter rapidement, se recroqueviller dans l’anecdote et que
le lecteur, s’il a envie d’en savoir plus, n’a qu’à se replonger dans les
grandes fresques russes d’autrefois ou le roman américain. Simonetta Greggio
n’a-t-elle pas eu le temps ou n’a-t-elle pas voulu développer une histoire qui
semblait lui échapper ? Mystère. On passe ce Col de l’Ange aussi vite
qu’une course contre la montre, avec un sentiment d’inachevé, une frustration
pénible. Pourrait-on dire à Simonetta Greggio que les épreuves de montagne ont
besoin de temps, de spectacle, de bruit ? Que les cols doivent se franchir
âprement pour marquer les esprits et nourrir les mémoires ? En bref, qu’un
écrivain, comme un cycliste, sache faire durer le plaisir. Eric Cabot
Col de
l’Ange, Simonetta
Greggio. Stock.